Bertrand Bonnello nous invite à l'Apollonide, maison
close parisienne, témoin d'une époque révolue. Là, des filles, toutes plus jolies les unes que les autres, vivent ensemble et cloîtrées, offrant leurs charmes et leur corps à des clients tantôt
pervers, tantôt cruels ou amoureux.
Présenté à Cannes, ce film est d'une splendeur fulgurante. Esthétiquement, il n'y a presque rien à dire. La lumière, les couleurs, les plans semblent sortir de tableaux impressionnistes, on pense
à Manet, Renoir au Rolla de Gervex. Les décors et costumes ravissent et certaines scènes au charme vénéneux saisissent encore longtemps après être sorti du cinéma (cruelle scène du salon parisien
où Madeleine est exhibée). Sans oublier des choix de mise en scène osés qui ponctuent le film à plusieurs reprises : split screen, utilisation de musique anachronique pour illustrer certaines
scènes...
Il n'y a pas d'héroïne au bordel, le film ne choisit pas de mettre l'une des filles plus en exergue que les autres, c'est leur clan qui forme une entité, elles sont fortes ensemble, elles sont
belles et unies, gardées pas une mère maquerelle rigide et maternelle.
Chaque actrice est remarquable, aucune ne se démarque vraiment et la plupart d'entre elles, inconnues, sont de vraies révélations de cinéma. Mis à part la mignonne Hafzia Herzi qui, après
Kechiche et Guiraudie, continue quant à elle de poursuivre une carrière aussi exigeante qu'exemplaire.
Il y a de la poésie dans l'Apollonide, une sensualité troublante, des images fortes, une émotion à fleur de peau... Seul l'épilogue, maladroit et superflu n'était peut être pas nécessaire.
Impeccable, puissant et indispensable.